La présence humaine contraint les animaux sauvages à une vie plus nocturne


Vendredi 10 Août 2018


Les animaux ont peur des êtres humains, leur premier réflexe est donc de les fuir et de rechercher des lieux où sa présence est rare. Mais ces zones hospitalières se font rares (voir le billet précédent) et les animaux obligés de cohabiter avec l’homme vont accroître leur durée de vie nocturne.

Des auteurs* ont comparé l’activité nocturne d’espèces sauvages soumises à une plus ou moins forte pression humaine. Leur analyse a porté sur 64 espèces de mammifères de taille moyenne à forte (>1kg) ; ces espèces étant  les plus souvent en conflit avec l’homme du fait de leur besoin d’espace. Elle s’est faite aussi à partir de données déjà publiées sur leur comportement journalier et l’intensité de la pression humaine auxquelles elles étaient soumises. Enfin les observations avaient été faites dans des zones réparties sur tous les continents. Les auteurs ont calculé pour chaque mammifère un « rapport risque » qui est le pourcentage d’activité qu’il présente la nuit dans des zones et périodes où la perturbation humaine est forte au pourcentage d’activité nocturne quand la perturbation humaine est faible.

D’une manière générale, l’activité nocturne des mammifères s’accroît d’un facteur 1,36 dans les zones et périodes où la perturbation humaine est élevée par rapport aux lieux où elle est faible. Quel que soit le type de perturbation humaine l’accroissement de l’activité nocturne des mammifères s’accroît ; paradoxalement la chasse n’entraîne pas un effet supérieur  aux autres perturbations (habitat, agriculture etc.). La réponse est générale mais elle est plus intense chez les mammifères de grande taille.

Les contraintes écologiques peuvent limiter la plasticité du comportement. Ainsi des espèces soumises à une présence continue des êtres humains vont accepter cette présence en dépit du coût élevé qui en résulte : stress accru, dépense énergétique élevée correspondant à la lutte contre un prédateur. Des espèces strictement diurnes peuvent quitter aussi l’aire à forte activité humaine laissant la place à des compétiteurs plus nocturnes ou à des espèces invasives. Des espèces apicales, incapables de s’adapter à la peur induite par la présence de l’être humain, diminuent leur activité de chasse cela va se traduire par une modification de la chaine trophique de tout l’écosystème.

Des modifications comportementales apparaissent aussi ; pendant le jour les animaux diurnes vont choisir des habitats plus protégés ou fuir les constructions humaines, ils peuvent rester plus longtemps au repos et diminuer leur période de recherche de la nourriture. Ils peuvent modifier leurs mouvements de veille.  Ainsi l’effet à priori insignifiant du décalage vers une vie plus nocturne est en réalité extrêmement négatif.

Nous n’avons pas conscience de l’effet perturbateur de notre présence vis-à-vis des espèces sauvages et de la peur qu’elle induit. Si notre présence est permanente, elle va les contraindre à changer leur mode de vie et les rendre plus fragiles dans leur compétition pour la survie.

*Kaitlyn M. Gaynor et al. Science, 15 juin 2018, N°6394, pp. 1232-12335

Il n’y aura pas de billet en septembre. Bonnes vacances.




Les questions environnementales vous intéressent-elles ? Vous pouvez enrichir vos connaissances et acquérir une vision globale de ces problèmes en lisant mon dernier livre : « Environnement, l’Hypothèque Démographique ».



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire